lundi 10 novembre 2008

Les péchés solitaires

Il existe dans ce vaste monde, certains plaisirs inavouables, qui ne sont accessibles que pour ceux qui cultivent le bonheur de la solitude. Depuis quelques semaines, à l'inverse de la nature qui s'endort et se meurt, je renais doucement et je m'adonne maintenant avec une joie crasse à l'enchantement de la liberté. Laissez-moi vous expliquer...

La première satisfaction du célibataire, celle qui surprend alors que nous baignons encore dans les abîmes de la souffrance, c'est de se retrouver seul dans son lit. J'avoue humblement que de devenir à nouveau seule Reine et Maîtresse de la nef qui navigue sur l'océan de mes rêves m'a remplie d'allégresse. Tout d'abord, pourvoir étirer mes longues jambes, l'une à tribord, l'autre à babord, tout en m'appropriant, sans coup férir, les deux oreillers qui barrent la tête du lit. Puis, m'assurer de couvrir chaque parcelle de ma personne de mes draps frais, me border de la tête aux pieds, sachant qu'aucune mutinerie de l'équipage ne me vaudra de me réveiller nue et frissonnante. Ensuite, le silence appaisant qui baigne le repos de la guerrière: rien, pas un son, pas un bruit, et surtout, pas un ronflement! Aaaaaahhh...

Le second instant de grâce, se répète inlassablement, jour après jour: celui de pouvoir sélectionner parmi les inombrables désirs de notre estomac, celui que nous choisirons d'honorer au prochain repas. Simplement, sans questionnement, sans négociation, sans inquiétude. Un ragoût? Un sandwich? Une petite salade? Une soupe? Un rien-du-tout-en-chocolat? Ne plus être la besogneuse fille de cuisine et devenir cheffe, maîtresse cordon bleu, artiste de la bouche! Se libérer de l'esclavage constant du trio viande-riz-légumes pour atteindre les stratosphères des potages surprenants, des verdurettes éclatées et des tofus mystérieux. Basta le régime sucré-sans-sucre-et-surtout-pas-de-"P" d'une moitié qui n'est pas douce du tout et bienvenue aux quiches et aux tartes aux tomates. De lourdes corvées répétitives, les repas deviennent un instant de grâce, léger et serein...

Enfin, un troisième ravissement: celui de pouvoir choisir à tout instant ou mènera le prochain moment. Un petit matin de week-end: mes yeux s'ouvrent au soleil qui s'étend paresseusement sur mon lit et me couvre de sa lumière. Que fais-je? Je ronronne encore quelques minutes ou je saute sur mes pieds pour les suivre dans les sentiers? Encore une fois, un seul être à combler, à satisfaire, à respecter: moi! La visite éclair à la bibliothèque se transforme en journée de lecture? Tant mieux! La longue liste de commissions est mystérieusement réduite à l'essentiel, c'est excellent! Un ami impromptu s'annonce dans trois minutes, pour un bonjour rigolo et un instant de joie à partager: merveilleux! Toutes ces décisions qui étaient si compliquées, si pleines de conséquences, retrouvent enfin leur caractère joyeux et léger, celui du bonheur simple d'être célibataire!!!

Aujourd'hui, je suis heureuse d'être seule.

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